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Marché du carbone | La fin du consensus

“Marché du carbone | La fin du consensus”


Douze ans. C’est le temps qu’aura duré le consensus autour du marché du carbone au Québec. Un consensus qui vient d’éclater dans la foulée de l’abandon de la taxe carbone fédérale. Dommage ? Certainement. Mais il y a peut-être aussi là une event à saisir.


Élaboré sous les libéraux de Jean Charest. Inauguré sous les péquistes de Pauline Marois. Soutenu par les caquistes de François Legault. Le marché du carbone a fait l’objet d’un fort et sturdy consensus depuis sa création, en 2013.

Pendant plus d’une décennie, aucun parti politique représenté à l’Assemblée nationale ne l’a contesté. Outre quelques étincelles allumées par le chef conservateur, Éric Duhaime, il n’avait jamais fait de grands remous dans l’espace public. Jusqu’à la semaine dernière, quand Paul St-Pierre Plamondon a donné un coup de pied dans la fourmilière.

Officiellement, le chef péquiste ne renie pas le marché du carbone. Le Parti québécois a même appuyé une movement réitérant le soutien envers cet outil le mois dernier. Mais il prend l’engagement d’en compenser les effets sur les automobilistes en faisant baisser le prix de l’essence. Sachant que l’objectif du marché est de fixer un prix sur la air pollution, ça revient pas mal à tirer dessus, à mon avis.

Pendant ce temps, des sondages montrent que 56 % des Québécois veulent mettre fin à la tarification du carbone. Des chroniques dans les journaux vont dans le même sens. Les agriculteurs québécois se disent désavantagés par rapport à ceux des autres provinces.

Bref, pour la première fois, ça brasse autour du marché du carbone.

Ce qui a fait tout chavirer, c’est évidemment l’abandon du volet pour les consommateurs de la taxe fédérale sur le carbone par Mark Carney. Les Québécois se retrouvent maintenant à être les seuls au pays à payer un prix sur le carbone.

Il ne manque pas de choses à déplorer ici.

Il est d’abord dommage que les libéraux fédéraux, après s’être battus jusqu’en Cour suprême pour imposer une taxe sur le carbone à l’ensemble du pays, ne l’aient pas mieux vendue à la inhabitants et aient fini par l’abandonner pour se donner une likelihood de gagner les élections. À grands coups de raccourcis et de mauvaise foi, Pierre Poilievre aura réussi son objectif de « mettre la hache dans la taxe ». Mais ironiquement, les bénéfices électoraux lui ont échappé.

Il est tout aussi triste de constater que cette politisation des enjeux climatiques a gagné le Québec. Le Parti québécois aurait-il fait sa sortie sur le prix de l’essence s’il ne devait pas faire face à Éric Duhaime dans une élection partielle à venir dans Arthabaska ?

Cela étant dit, la scenario actuelle n’a pas que du mauvais. Parce que pour une uncommon fois, on parle du marché du carbone dans l’espace public. Et il pourrait en ressortir du positif.

J’ai toujours soupçonné que le consensus envers ce marché venait largement du fait qu’il est méconnu et mal compris des Québécois. Normand Mousseau, directeur scientifique de l’Institut de l’énergie Trottier, plaidait même récemment dans le Globe and Mail que le succès du marché du carbone québécois tient à son « invisibilité » et à son « opacité »1 !

Or, bâtir un consensus en taisant un enjeu peut fonctionner un bout de temps, mais c’est loin d’être idéal.

À la pompe, les Québécois ignorent largement combien d’argent est prélevé de leur poche par le marché du carbone (la réponse : un peu moins de 10 cents par litre). Cette ignorance fait que le prix sur la air pollution perd une partie de son effet dissuasif. L’skilled en énergie de HEC Montréal Pierre-Olivier Pineau a toujours déploré ce manque de visibilité.

Aujourd’hui, les critiques qui fusent obligent les partisans de cet outil à l’expliquer et à le défendre. Le gouvernement Legault l’a fait récemment et il faut l’en féliciter. Le Comité consultatif sur les changements climatiques, un groupe de scientifiques qui conseille le gouvernement provincial, fera la même selected mercredi à l’Assemblée nationale.

Marché du carbone | La fin du consensus - Mr. Acuity News - 2

PHOTO DENIS GERMAIN, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Alain Webster, professeur titulaire du département d’économie de l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke et président du Comité consultatif sur les changements climatiques du gouvernement du Québec

Si le débat se résume à dire qu’on paye plus de taxes, ça ne mène à rien. Tout le monde veut payer moins de taxes. Si on se demande plutôt s’il est pertinent d’avoir des politiques publiques sur les changements climatiques, là, on avance.

Alain Webster, professeur et président du Comité consultatif sur les changements climatiques

« Parce que depuis un an, on n’en parle plus. C’est l’effet de Trump », observe-t-il.

En bref, la controverse actuelle nous drive à nous rappeler pourquoi on a créé un marché du carbone, il y a 12 ans. La réponse : parce qu’il y avait alors une crise climatique qui, loin de s’atténuer, s’est exacerbée depuis.

La dialogue actuelle peut nous amener plus loin. Parce que notre marché du carbone, aussi fondamental et nécessaire soit-il, n’est pas parfait.

La taxe fédérale sur le carbone retournait l’argent perçu dans les poches des citoyens. Le marché québécois, lui, le canalise vers le Fonds d’électrification et de changements climatiques (l’ancien Fonds Vert). Or, sans être la caricature qu’on en fait souvent, ce fonds n’a pas toujours été un modèle de gestion exemplaire. Et il finance souvent des initiatives peu efficaces.

Devrait-on prendre une partie de ces fonds pour les retourner dans les poches de ceux qui payent un prix sur le carbone et qui n’ont pas d’autres choices pour l’éviter ?

Alain Webster estime qu’il faut se poser cette query.

« On a dit à maintes reprises qu’il fallait plus d’équité dans la lutte contre les changements climatiques », dit-il.

Mais cela doit se faire beaucoup plus finement que de simplement baisser le prix de l’essence. Comme se le demande lui-même Paul St-Pierre Plamondon, peut-être qu’un Québécois à faible revenu vivant loin des transports en commun, par exemple, mériterait un sure soutien.

Mais le riche Montréalais qui vit à côté du métro et roule en VUS énergivore ? Ce sont les plus riches et les plus grands pollueurs qui profiteraient le plus d’une baisse de taxe généralisée sur l’essence, comme l’a d’abord proposé M. St-Pierre Plamondon. Comme Alain Webster, je suis d’avis qu’on serait ici à l’precise opposé d’une écofiscalité intelligente.

« Qui soutient-on ? Quelles régions ? Quels secteurs ? Est-ce qu’on doit mieux soutenir le secteur agricole, par exemple ? Si la dialogue actuelle permet d’ouvrir le débat sur les enjeux d’équité, tant mieux ! », lance Alain Webster.

Qu’on en parle en bien ou qu’on en parle en mal, on parle actuellement du marché du carbone. À nous d’en faire collectivement une dialogue intelligente.



1. Lisez la lettre « How did Quebec’s carbon tax survive ? The province made it invisible » (en anglais ; abonnement requis)



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